E-santé : bientôt son dossier médical sur smartphone ?
Face à l'échec du dossier médical partagé, il faut faciliter la mise à jour des données de santé des patients. Cela passerait par la création d'une application qui permette de transmettre des informations médicales depuis son smartphone.
Sur le plan informatique, le monde de la santé est l’un des plus fragmentés. Dans certains services hospitaliers, il n’est pas rare de devoir se connecter à près d’une dizaine de systèmes informatiques différents pour espérer accéder à l’ensemble des données médicales d’un patient. Et ces systèmes varient d’un hôpital à l’autre. En parallèle, les nouvelles technologies laissent entrevoir d’extraordinaires possibilités pour faciliter la sortie anticipée du patient de l’hôpital et sa prise en charge ambulatoire. Par exemple, le projet Cardiauvergne du professeur Jean Cassagnes a montré comment réduire de moitié la mortalité et diviser par 3 les hospitalisations chez le patient insuffisant cardiaque en l’inscrivant dans un système de télémédecine impliquant des balances connectées et des questionnaires électroniques remplis à domicile par l’infirmière.S'appuyer sur une base informatique commune
La transposition sur le plan national des nombreux pilotes de ce type ayant montré à l’échelle régionale une efficacité réelle permettrait ainsi d’améliorer grandement la qualité de vie des patients tout en diminuant les coûts du système de soins. Mais le développement de la e-santé ne pourra s’effectuer que si les différentes structures de soins s’appuient sur une base informatique commune. Sur le papier, le dossier médical partagé (DMP) un projet public initié il y a plus de 10 ans apparaît comme une excellente solution. Mais après une gestion de projet hasardeuse, le DMP gère péniblement à ce jour les données de 558.881 personnes soit moins de 1 % de la population française. Il a portant coût prêt d'un demi-milliard d'euros au contribuable. Une solution de rupture pourrait peut-être permettre de sortir de ce fiasco et répondre au besoin criant de standardisation des systèmes informatiques. En effet, deux acteurs ont été négligés dans la démarche : le patient et les géants de la technologie comme Google, Apple ou IBM.Responsabiliser le patient
Le patient a un droit légitime d’accéder à ses données de santé : bilan biologique, radiographie, compte-rendu opératoire, etc. Depuis près de 20 ans, la démocratisation du digital n’a eu de cesse de le responsabiliser en lui donnant accès dans un premier temps à de l’information sur sa ou ses pathologies et dans un second temps sur sa propre santé, notamment avec l’arrivée de certains objets connectés et d’applications comme « Santé », d’Apple. Or, c’est la responsabilisation du patient qui sera à l’origine des plus grands progrès thérapeutiques du siècle. Actuellement, l’application « Santé » stocke les données en local, dans le téléphone de chaque patient. L’évolution logique de cette application sera de permettre un stockage des données médicales dans un cloud – c’est à dire sur un serveur distant – sécurisé. Il n’est pas absurde de penser qu’une prochaine mise à jour d’iOS et d’Android offrira cette possibilité. Dès lors, le patient pourra décider s’il souhaite ou non partager ses données médicales avec un tiers, comme son ou ses médecins.Rendre les dispositifs médicaux compatibles
Pour répondre à la demande, face au rouleau compresseur marketing d’Apple et de Google, les fabricants de dispositifs médicaux n’auront d’autre choix que d’être compatibles avec ces technologies. Et nul doute que la première des Big Techs qui offrira une solution technologique compatible avec l’ensemble des téléphones du marché s’offrira sans mal une position dominante. Ce scénario, s’il venait à se produire, permettrait de voir émerger à brève échéance un dossier médical partagé efficace qui se déploierait à la vitesse fulgurante des mises à jour de nos téléphones. Il ne resterait plus aux médecins que de s’adapter à cette nouvelle technologie et au législateur de cadrer ce nouveau DMP. La transformation digitale de la santé pourrait alors véritablement commencer. Source: Olivier Gryson, responsable du digital dans un laboratoire pharmaceutiqueArticle publié le 16/10/2015